Un conseiller est intervenu auprès de la Société civile des producteurs phonographiques, après le refus de cette dernière d'attribuer au producteur de rap Pierre Sarkozy une aide pour un projet musical.
PAR FLORENT LATRIVE
Pierre Sarkozy et son père reçus par le président brésilien Lula lors d'une visite d'Etat le 6 septembre 2009. (AFP/GERARD CERLES)
Après Jean, Pierre? Suite au refus par la Société civile des producteurs phonographiques (SCPP) d'octroyer une aide à Pierre Sarkozy, producteur de rap (il a notamment produit Doc Gynéco), pour l'un de ses projets, un conseiller de l'Elysée serait intervenu auprès de cette dernière pour qu'elle revienne sur sa décision et apporte son soutien au fils du président.
Selon le site Electronlibre.info, qui a révélé cette affaire samedi, la SCPP aurait alors promis de tout arranger et que, «lors de la prochaine commission, l’affaire serait réglée dans le sens qu’il convient».
Ce coup de pouce de l'Elysée pour aider l'un des fils du président en intervenant auprès d'un organisme indépendant survient quelques semaines après la bronca entourant l'arrivée de Jean Sarkozy à la tête de l'Etablissement public de la Défense.
Présidée par le patron d'Universal Music France Pascal Nègre, la SCPP regroupe plusieurs dizaines de producteurs, dont les quatre majors (Universal, EMI, Sony-BMG, Warner). Elle est chargée de collecter la rémunération de ses membres auprès des utilisateurs de leurs catalogues (sites web, radios etc.) La loi lui impose de réserver une partie de ces sommes au soutien à la création, et c'est le rôle de la commission des aides, justement, de choisir les projets parmi les dossiers qu'elle reçoit.
Contacté par Rue89, le directeur général de la SCPP, Marc Guez, a confirmé avoir reçu un appel de l'Elysée suite au refus, fin septembre, de la commission chargée d'attribuer les aides d'apporter son soutien au projet de Pierre Sarkozy, évalué à 80.000 euros au total. «Nous avons préféré privilégier les membres de notre association. Il est très rare que nous versions des aides à des non-membres, même si c'est déjà arrivé», a-t-il expliqué, indiquant que Pierre Sarkozy n'est pas adhérent de la SCPP. Marc Guez se défend pour autant d'avoir subi des pressions et affirme que «ce conseiller ne [lui] a pas demandé de faire en sorte que cette aide lui soit versée».
Une affirmation répétée dimanche après-midi par un communiqué officiel de l'organisme expliquant que, si «la SCPP a été interrogée», ses services ou sa direction n'ont, à «aucun moment, directement ou indirectement, (...) été sollicités pour accorder un traitement de faveur» à la société dont Pierre Sarkozy est actionnaire (Mind's corporation), «sous quelque forme que ce soit, pour le présent comme pour l’avenir.»
Sur ce point, Electronlibre.info, site spécialisé dans l'information sur les médias et la culture réputé fiable, assure qu'au contraire la SCPP a apporté toutes les «garanties» pour que cette aide soit in fine débloquée.
«Cela n'arrivera pas», assure le président de la société de production Abeille Musique et membre de la SCPP, Yves Riesel, contacté par Libération dimanche. Lui-même a longtemps siégé à la commission, et il la décrit comme «très formaliste et cherchant toujours à distribuer les sommes de façon équitable». Il confirme qu'avec la crise du disque et l'augmentation du nombre de dossiers, «cela fait des mois et des mois que les aides sont réservées aux membres» de la SCPP. Et que rien n'empêche Pierre Sarkozy d'adhérer.
«Si ce petit garçon n'est pas capable de téléphoner lui-même à la SCPP pour demander des explications comme n'importe quel producteur et qu'il demande à l'Elysée de le faire, ça le regarde», dit Yves Riesel.
Dans la soirée de dimanche, le conseiller culture et communication de Nicolas Sarkozy, Eric Garandeau, a précisé à l'AFP qu'il avait effectivement demandé des explications à la SCPP, affirmant qu'il était «sollicité en permanence par des producteurs à qui on a refusé une subvention et [qu'il] demande systématiquement les raisons du refus». Cette fois, il aurait en plus «pris deux précautions: j'ai mentionné par oral et écrit que l'Elysée ne demandait aucun traitement de faveur et je n'ai pas cité le nom de Pierre Sarkozy».
Source: Libération