26/03/2010
L'arrestation d'un gang de banquiers véreux ébranle la City
On les appelait les traders rois. Ils savaient tout et possédaient mieux que personne l'art d'anticiper les augmentations de capital des entreprises. Ils avaient la fortune et la chance. Une infernale baraka. Mais là, le jeu était biaisé. Les intéressés n'étaient pas d'heureux veinards. En fait, ils étaient tuyautés par un gang d'au moins sept banquiers véreux, arrêtés mardi 23 et mercredi 24 mars, dans le cadre de la plus grande opération de police jamais lancée en Grande-Bretagne contre des auteurs présumés de délits d'initiés.
La chute du clan a provoqué un vif émoi, car au moins trois entreprises londoniennes parmi les plus prestigieuses sont éclaboussées. Les trois supposés leaders - Martyn Dodgson, Julian Rifat et Clive Roberts - travaillent respectivement pour Deutsche Bank, le fonds spéculatif Moore Capital et Exane Ltd, dont les locaux ont été perquisitionnés.
Du beau linge, à l'instar de Clive Roberts, expert des ventes d'actions européennes au siège londonien d'Exane, coentreprise détenue à 50 % par BNP Paribas, mais autonome sur le plan opérationnel. Le groupe comprendrait aussi un homme d'affaires iranien, Iraj Parvizi, qui partage son temps entre Londres et le Proche-Orient.
D'après les informations ayant filtré, les malfaiteurs présumés ont vendu des informations confidentielles à des traders, en tirant de juteux profits. Une partie des bénéfices leur était sans doute rétrocédée et versée sur leurs comptes bancaires personnels.
Savoir ce qui va se passer demain peut valoir de l'or. Le détenteur d'un secret financier peut facilement le monnayer. C'est pourquoi, sur toutes les places financières, le délit d'initiés est fortement sanctionné et le coupable peut aller en prison. Reste que cette tricherie, souvent complexe, est difficile à prouver devant les tribunaux. Les enquêtes sont longues, coûteuses et compliquées à mener. L'investigation de cette dernière affaire a ainsi été lancée à la fin de 2007.
Recourir aux grands moyens
Si les conversations sur des téléphones fixes de la salle des marchés sont toujours enregistrées, ce n'est pas le cas des échanges sur téléphone mobile pendant ou après les heures de bureau. Dans les bars et pubs où les "yuppies" noient leur stress sous des flots de bière après le travail, les langues des banquiers parfois se délient. Ces grands adeptes du secret peuvent être très bavards pour épater, voire par simple cupidité.
Pour débusquer les délits d'initiés, les limiers de la Financial Services Authority (FSA), la tutelle de la City, ont longtemps hésité à recourir aux méthodes musclées à l'américaine : mise sur écoutes, utilisation de "balances", interpellations médiatisées. Ces arrestations soulignent que l'autorité de régulation n'hésite plus à recourir aux grands moyens pour traquer l'infraction et protéger la réputation de la première place financière européenne.
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